Ladj Ly : « Pour réussir dans le cinéma, il faut travailler dur »
D'où tiens-tu ta réussite ?
Ladj Ly : J'ai beaucoup travaillé. Certes, ça ne payait pas mais c'est de l'expérience. C'est comme ça qu'on apprend. Je n'ai pas fait d'école de cinéma mais j'ai surtout fait l'école de la rue où j'ai appris sur le tas. Rien n'est perdu finalement. Même quand on fait un projet qui tombe à l'eau ou qui n'aboutit pas, ça reste avant tout de l'expérience et de la formation quelque part. C'est un tout, moi j'ai mis du temps à me construire, j'ai eu beaucoup d'échecs. Mais finalement ce sont ces échecs qui m'ont permis de réussir aujourd'hui.
Grâce au succès des Misérables, penses-tu produire plus facilement tes prochains films ?
C'est vrai que Les Misérables, on a eu beaucoup de difficultés à le faire financer. Ça a été le parcours du combattant. Les Misérables, ça reste une trilogie. On aura trois films : le premier est là et les deux autres vont suivre. J'espère qu'on aura moins de difficultés à les faire financer. Du moins, on l'espère ! Vu le succès qu'on a pu avoir avec Les Misérables, ça devrait bien se passer.
La banlieue t'inspire beaucoup. Vas-tu continuer sur cette thématique ?
Si je parle énormément de la banlieue, c'est que je parle avant tout de mon village. Comme on dit : si tu veux parler à l'universel, parle déjà de ton village. Donc, c'est ce que je fais. Je parle de mon territoire car je le connais mais, bien évidemment, je fais d'autres choses à côté. Je vais faire d'autres films qui ne sont pas forcément liés à la banlieue. Mais pour l'instant je reste vraiment concentré sur ces thématiques qui sont importantes aujourd'hui.
Entre l’omniprésence du rap dans la sphère musicale et le succès de ton film, on a l’impression que la banlieue exerce une forme de fascination. Pourquoi selon toi ?
Je ne pourrais pas l'expliquer. Après, la banlieue reste un vivier de talents. On le sait bien, il y a énormément de gens talenteux qui sortent de là. Malheureusement, ça a toujours été le parcours du combattant pour eux. Donc, on part du principe que si on met les moyens dans ces quartiers, on peut sortir énormément de talents parce qu'on sait qu'il y a un potentiel énorme.
Pourquoi avoir créé l'école Kourtrajmé ?
Dans le collectif, personne n'a fait d'école de cinéma. Je pense que si j'avais postulé, je n'aurais jamais été pris. Avec l'expérience qu'on a acquise, on s'est dit que c'était important de créer une école, sans qu'elle soit institutionnelle comme celles qui existent déjà. On avait envie d'apporter notre touche, notre façon de faire. On part du principe qu'on a tout appris sur le tas, qu'on a vachement été sur le terrain et c'est justement ce qu'on essaie de transmettre avec cette école. On est au plus près de la réalité et du terrain. On emmène très vite nos élèves sur les tournages. On les met tout de suite dans le bain pour qu'ils soient opérationnels. J'estimais que l'école Kourtrajmé était importante pour tous les gens qui n'ont pas l'opportunité d'accéder aux écoles comme La Fémis. C'est aussi leur laisser une chance pour qu'ils puissent apprendre et raconter leur histoire.
Quels conseils donnerais-tu à ceux qui veulent se lancer dans le cinéma ?
Si vous n'êtes pas motivé, passionné, déterminé, faites autre chose. Allez travailler à La Poste ou allez vendre des fruits et des légumes. C'est avant tout un métier de passionné. C'est un métier très dur. Il faut être patient, il faut travailler très dur, sans arrêt. C'est ce qu'on a toujours fait, on a toujours travaillé, on n'a jamais rien lâché. Donc le conseil c'est : travaillez, ne lâchez rien. Aujourd'hui, on a la chance d'avoir des caméras partout. N'importe qui a une caméra sur son smartphone, n'importe qui peut avoir un logiciel de montage, donc il n'y a plus d'excuse. Faites !