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Politiquement correct ?

Entrons donc dans le vif du sujet. Pour Joanna, trois enjeux sont fondamentaux : l’écologie, le féminisme et les questions de racisme en France. Mais la politique ne constitue pas nécessairement une solution. Alain, lui, a une autre approche.

Joanna

« Je sais qu’on est obligé de s’intéresser à la politique, pour justement être actif dans toutes ses décisions. Mais je prends du recul. Ce n’est pas que je ne comprends pas, mais je les trouve ridicules, je n’arrive pas à les prendre en considération. Et je pense qu’espérer que la politique ait un impact positif sur ma vie est un peu utopique. Quand je parle avec mes parents, eux à 20 ans, ils pensaient aussi qu’il y avait la possibilité d’un grand changement magique. Mais ça ne s’est jamais produit ! Donc je suis un peu pessimiste par rapport à ça. »

Alain

« Je pense qu’une classe dominante, qui dominait déjà à mon époque, domine de plus en plus en devenant malsaine. Moi, j’ai connu les capitalistes qui faisaient du capitalisme… j’allais presque dire normal. Et voici que petit à petit, le capitalisme a changé de base, et est devenu de plus en plus financier, de plus en plus prédateur. Et la chose la plus grave, à mon sens, c’est que les salariés aujourd’hui ont perdu le sens de classe, c’est-à-dire qu’ils ne se rendent même plus compte que la classe qui est en face d’eux est en train de les dévorer tout cru. C’est très dommageable pour l’avenir. Les enjeux de société les plus importants aujourd’hui pour moi, c’est que les gens puissent vivre. Ça veut dire quoi ? Satisfaire ses besoins primordiaux et ajouter quelques satisfactions subsidiaires, comme se cultiver, se distraire, s’enrichir l’esprit. Il faut enrichir le pays à la base, et non pas au sommet. Les combats menés par les jeunes aujourd’hui, et par les jeunes femmes en particulier, qui font preuve de beaucoup d’intelligence et d’imagination, je ne peux que les soutenir. J’en suis très content, mais je souhaiterais un combat plus global. Mais les petits ruisseaux… n’est-ce pas ? »

Bilan

Beaucoup d’études suggèrent que l’engagement des jeunes se situe moins dans ses formes traditionnelles, que constituent les partis et les syndicats, et le témoignage de Joanna semble aller dans ce sens. Incontestablement, les jeunes sont globalement engagés : en France, un jeune sur deux de moins de 25 ans donne de son temps à une association, un projet social ou politique, structuré ou non. Mais ce serait aller trop vite en besogne que de considérer que l’engagement serait propre à leur génération. En témoigne Vincent Coquebert : « j’ai dû analyser pour le cabinet d’études Story mind une enquête qui a été faite sur les 18-34 ans et les 35-65 ans. Et on se rend bien compte, en fait, que les engagements comme la cause environnementale, le féminisme, ce genre de choses, sont circonscrits à tort à une jeunesse qui serait, d’un seul coup et uniformément, sur un retour à l’engagement. Et bien non, ce sont des valeurs qui sont portées par toutes les cohortes de la société. »